lifestyle Le CrossFit© m'a tuER

Ça y est, il fallait s’en douter, le CrossFit a fait sa première victime. Depuis le temps que les réfractaires à ce sport s’amusaient à mettre sans cesse en avant quelconques études prouvant la nocivité de la pratique à haute intensité, ils vont enfin être servis avec ce fait divers, survenu il y a quelques semaines. De la viande fraîche pour les charognards, un comble pour les adeptes du régimes paléo qui cette fois-ci, seront les chassés et non les chasseurs.

Vous n’entendrez pas parler de cette histoire à la télévision, ou dans n’importe quel média grand public, en tous cas pas de suite. Cette affaire restera interne à la communauté sportive. Et c’est peut être mieux ainsi.

Je me suis entretenu avec son partenaire d’entraînement pour essayer d’en savoir plus sur les conditions de ce drame. J’ai donc été reçu par Damien, un coach expérimenté qui continue comme tous les passionnés de pratiquer régulièrement le fitness et qui depuis une dizaine d' années, ne s’entraîne qu’avec les méthodes CrossFit. Je ne suis, par contre, pas autorisé à dévoiler l’identité de la victime puisque l’enquête suit son cours. Nous la nommerons “Bucky”.


Tout a commencé il y a donc environ 10 ans, lorsque Damien et Bucky, deux partenaires d’entraînement inséparables, tombent sur la photo d’une Kettlebell sur un réseau social. Ils cliquent sur la photo et tombent sur la page CrossFit HQ. Le coup de foudre est inévitable, et après plusieurs heures d’affilées de visionnages de photos et de vidéos en tous genres, ils se promettent mutuellement que désormais, leur activité physique ne sera que CrossFit, et rien d’autre !

Damien est à ce moment là coach depuis environ 7 ans, et Bucky le met rapidement en confiance. Il le persuade que chaque mouvement peut être décomposé pour être facilement assimilable et que leurs années de pratique alliées aux connaissances techniques de Damien suffira amplement pour le bon déroulement de leurs futures séances.

Alors ils enchaînent jours après jours les séances à haute intensité. Leur contenu varie sans cesse : haltérophilie, gymnastique, cardio-training, peu importe si certains mouvements paraissent difficiles techniquement, leurs années d’entraînement semblent plaider en leur faveur et leur permettent de produire des performances plutôt honorables.

Damien et Bucky ne s’entrainent pas dans une affiliée, car ils travaillent déjà dans une autre salle et n’ont donc pas le temps de s’y rendre. Damien réussi grâce à ses connaissances à corriger son partenaire d’entraînement et à lui éviter les blessures. Pendant ce temps, Bucky réussi grâce à sa force de persuasion à convaincre Damien de toujours mettre plus d’intensité lors de ses mouvements et de ses enchaînements, en mettant en avant le fait qu’il a sûrement la meilleure condition physique de la salle, et qu’il se doit d’être plus fort, plus rapide, plus puissant que tous les autres.

Seulement, avec le temps, Damien se rend compte que de petites douleurs apparaissent. Dans le bassin d’abord, puis dans le dos. Il se dit que peut-être, les séances sont parfois un peu trop intensives, que les barres sont parfois un peu trop lourdes ou que les mouvements sont parfois un peu trop mal exécutés. Bucky le rassure immédiatement. Si Damien réussi à boucler les WOD, c’est que les charges ne sont pas si lourdes que ça. Ces douleurs sont tout à fait normales et ne sont, de toutes façons, pas nouvelles. Effectivement, Damien a souvent eu des problèmes de dos auparavant.

Alors après deux ou trois jours de repos, ils repartent de plus belle. Les entraînements s'enchaînent, les résultats et la motivation sont de plus en plus présents, tout comme les douleurs de Damien. Mais elles sont supportables lui dit Bucky, et n’enlèvent en rien la satisfaction que procure chaque séance, chaque WOD.

Et puis un jour, le drame. La séance de trop :

“FOR TIME : 100 Thrusters, 60 kilos”

La douleur s’éveille durant l’exercice. Elle devient insupportable pour Damien. Le dos, le bassin, l’aine, plusieurs alarmes se mettent alors à sonner. Le pire arrive à Bucky. Il ne survivra pas à la séance. Dès qu’elle se termine, il reste anormalement allongé. Sans bouger. Damien comprend alors qu’il se passe quelque chose.

Ils ont le temps d’échanger quelques mots : Bucky lui assure que pourtant, ils étaient préparés, ils avaient suffisamment de force pour déplacer des charges lourdes, pour produire une intensité maximale. Damien lui demande et se demande en même temps comment ils ont pu être aussi idiots. Comment ont-ils pu croire que la puissance était la seule condition pour pouvoir pratiquer ce sport? Comment ont-ils pu omettre la souplesse, la mobilité? Ils se rendent compte que lorsqu’un athlète possède un vécu et un potentiel qui peuvent lui permettre de déplacer des charges conséquentes, alors le CrossFit devient davantage une pratique à risques. Une pratique qui a besoin d’encadrement, de professionnalisation. C’est tout un corps, tout un mode de vie qui doivent être rééduqués. Et ça, les deux partenaires d’entraînement ne l’ont appris que trop tard.

Damien s’en est sorti avec deux protusions discales, une hernie inguinale et un dysfonctionnement sacro-iliaque. Pour Bucky en revanche, le constat est sans appel. Un bref adieu entre les partenaires et la disparition définitive de Bucky.

Ils ne s’entraîneront plus jamais ensemble, ne feront plus aucun Wod ensemble. Bucky ne sera plus jamais là pour motiver Damien au point de l’amener au delà de ce qu’il est capable de faire.

Bucky est mort.

Bucky était l’ego de Damien.

Peu importe le nom qu’il porte, la plupart des blessures surviennent par sa faute, aucune par la nature de l’activité. .

Que ce soit dans le CrossFit ou dans n’importe quel sport.

Ne l’emmenez jamais avec vous à l’entraînement.

Jamais.

Damien Stymans.

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